De l’histoire de Momo, le médecin garagiste
Il y a quelques temps, Raoul et LP ont décidé de bannir de leur cercle les médecins, spécialistes ou non, qui font les questions et les réponses, catégorisent les patients à la première seconde et présument par un sourire en coin que ces cons de patients ont déjà leur idée du diagnostic en s’étant renseignés sur internet (quels débiles, ces patients).
Ces médecins en consultation ont généralement le doigté d’un garagiste :
- ma bonne dame, on remplace l’embrayage, et ça ira bien !
- mais Docteur, vous avez déjà changé l’embrayage, et le bruit sourd qui me tape sur le système continue. C’est très inconfor….
- Ecoutez, je connais mon boulot. Le bruit, c’est pas le problème, ma petite dame. On va laisser faire le professionnel ?
- Bon, soit. Et bien indiquez moi alors les raisons pour lesquelles vous pensez que l’embrayage est à nouveau à remplacer. Ça peut être int….
- Il faut le remplacer, c’est important. Vous comprenez ? (petite voix un peu plus aigüe que nécessaire, comme quand on s'adresse à un tout petit enfant)
- Non, parce que s’il y a une autre cause ? Ça pourrait êtr… ?
- (excédé) Je lis pas dans une boule de cristal, on verra bien. »
Il y a plusieurs semaines, le Dr Borée pondait un article fort drôle sur les « Gygys », l’épouvantable surnom donné aux femmes qui échangent sur Doctissimo, quand elles essayent de débriefer entre elles ce que leur a dit leur médecin spécialiste en gynécologie.
J’étais ce jour-là totalement du côté du Dr Borée, parce qu’infantiliser un docteur en l’appelant Gygy, s’est aussi s’auto infantiliser. Et puisque je vénère ma gynécologue, qui est une femme remarquable qui explique bien les différents cas de figure en cas de difficulté, qui avoue quand elle ne sait pas et qui oriente plutôt qu’elle n’impose, forcément, j’ai pas envie de l’appeler Gygy, parce qu’elle me parle comme à une personne douée d’un sens critique et d’une capacité de décision.
Aujourd’hui, j’ai une vision différente. Parce que je suis allée voir Momo, l’ophtalmo, pour le strabisme de Pépita (Pépita louche mignonnement, certes, mais vachement. On veut qu'elle voie bien, certes, mais si elle peut aussi voir droit, ca nous semble pas mal) : Compte tenu de ma colère, consécutive à la consultation, j’ai ENVIE d’appeler cette connasse Momo, histoire de lui flinguer sa posture de « OUI, je suis MEDECIN, je suis STRABOLOGUE (classe), et je sais mieux que toi, voilà, ta gueule. ».
Le Dr Borée ne doit certainement pas se rendre compte de la capacité de beaucoup de médecins à infantiliser leurs patients (et en l’espèce, les parents de leurs patients), notamment en ne les laissant pas finir leurs phrases ou leurs questions, en anticipant (mal) leurs préoccupations (le médecin, il en a vu 10 comme ça, dans la journée, des parents relous qui posent les mauvaises questions).
J’avais oublié ces médecins mécanos, qui lèvent les yeux aux cieux quand on ose se questionner sur une corrélation entre des symptômes, ces médecins, soit péremptoires, soit s’abritant derrière un "je n’ai pas de boule de cristal" ou "je ne fais pas de statistiques", pour éviter de formuler plusieurs hypothèses, ce qui entacherait leur crédibilité d'experts.
Momo a fait une moue dubitative quand je lui ai expliqué que je venais la voir après avoir parlé avec plusieurs parents d’enfants qui semblaient avoir des problèmes similaires et que j’avais des questions auxquelles mon ophtalmo habituelle n’avait pas pu ou pas eu le temps de répondre. Momo n’a pas aimé que je remette ainsi en cause la Parole d’un Médecin. Momo a refusé de m’expliquer ce qui était probable dans l’évolution du strabisme de ma fille et ce qui ne l’était pas : « c’est pas le problème, le problème pour l’instant, c’est l’acuité », tout en omettant de me préciser combien de temps durait le « pour l’instant » et en éludant mes questions sur les options possibles ensuite.
Je sais davantage sur le strabisme de ma fille en discutant avec les autres parents qu’avec Momo.
Quand au final, j’ai pêté une durite, Momo m’a asséné qu’elle n’avait pas le temps de faire de la psychothérapie pour les parents. Je lui ai demandé de simplement les écouter et les laisser finir leurs phrases. Je ne pense pas qu’elle fasse quoi que ce soit pour rectifier sa conduite, mais sa secrétaire m’a remerciée d'avoir dit cela (elle parle comme ça à tout le monde, manifestement). Je n’avais jamais osé me rebeller face à un médecin.
Momo a bien assuré lors de sa dernière consultation : 10 minutes, 60 euros - Raoul, cette débile, a l'air ravi
A 18 ans, quand je suis allée pour la première fois chez une connasse de Gygy, elle n’a jamais voulu débattre avec moi d’un mode de contraception adapté à mon identité (je ne voulais pas prendre la pilule, considérant que c’était un médicament, à prendre quotidiennement, et déresponsabilisant pour la protection anti SIDA). Elle m’a limite insultée (« les filles d’aujourd’hui, ça comprend pas les combats qui ont été menés ! La pilule, c’est ce qu’il y a de mieux, c'est une attitude réactionnaire que vous avez là, vous préférez tomber enceinte et avorter ?»). Au lieu de la rebeller, je suis restée 6 ans sans suivi gynécologique pour ne plus avoir à affronter cela.
Les médecins garagistes, cela nuit à la santé des patients. Ce n’est pas JUSTE une question de politesse.
L’orgueil et le mépris des médecins pour leurs patients, c’est ce qui pousse à les appeler Gygy ou Momo, et à aller discuter sur des forums de patients qui dégorgent d'empathie.
Permets moi de te dire, Momo, non seulement t’es une connasse mais t’es AUSSI et SURTOUT un mauvais médecin (par contre, tu peux ouvrir un garage).